Comment rester compétitif à l’export malgré la montée du protectionnisme ?

Dans un contexte mondial où le protectionnisme gagne du terrain, les entreprises françaises doivent redoubler d’efforts pour maintenir leur compétitivité. Christophe Février, International Business Development Director, illustre comment la stratégie de l’entreprise familiale Fromi, distributeur de spécialités fromagères, alliant qualité, innovation et responsabilité permet de surmonter ces défis.

Le protectionnisme croissant fragilise les exportateurs. Cette montée, caractérisée par l’augmentation des barrières douanières, complique l’accès aux marchés internationaux et exacerbe les tensions commerciales, notamment avec les États-Unis.

Une enquête menée en janvier 2025 par le CROCIS, l'observatoire économique de la CCI Paris Ile-de-France, auprès de 515 PME franciliennes révèle que 54% d’entre elles estiment que le contexte international actuel a un impact négatif sur leur activité exportatrice. L’incertitude économique (77%) est la première difficulté soulevée, suivie par la réduction de la demande des marchés étrangers (44%).

Christophe Février partage cette préoccupation : « Nous sommes confrontés à des réglementations de plus en plus complexes, ce qui peut avoir un impact sur notre compétitivité sur certains marchés ». Comme 4% des entreprises sondées dans l’étude du CROCIS, il reste relativement positif, spécifiquement concernant le contexte états-unien.

Christophe Février travaille à l’international depuis 30 ans. Il a entamé sa carrière dans le groupe Lesieur. Il a quitté les huiles pour le fromage en poursuivant son parcours chez Sodial, puis Triballat. En 2020, il a rejoint le groupe familial Fromi.

Fromi, une stratégie au goût d’exception

Depuis près de 60 ans, la société Fromi s’impose comme un ambassadeur du fromage premium à travers le monde. Avec un ADN tourné vers la qualité et l’originalité de ses produits, l’entreprise sait concilier tradition et innovation pour se différencier. Elle fabrique sous sa propre marque et réalise un sourcing de qualité. Globalement, Fromi reste un intermédiaire entre un amont et un aval. L’entreprise collabore avec plus de 300 producteurs français et européens, offrant ainsi une gamme de produits fromagers singuliers. Un réseau de producteurs partenaires soigneusement sélectionnés, parfois très petits ou méconnus, mais toujours porteurs d’un savoir-faire artisanal. « Notre stratégie repose sur la qualité, le premium et notre capacité à sourcer des produits rares et authentiques », explique Christophe Février. 

Un positionnement haut de gamme qui ne doit rien au hasard. « On a toujours cherché à se démarquer, à renouveler notre offre, comme proposer une Fourme d’Ambert au Sauternes et des bleus crémeux au chocolat façon pâtissier. C’est ce qui forge notre identité », complète-t-il. 

Faire découvrir des spécialités ancrées dans les terroirs et raconter des histoires à travers chaque fromage, savoir se faire plaisir, c’est toute la philosophie de Fromi. 

Une approche qui trouve un écho particulier dans des marchés sur lesquels le goût français et l’authenticité ont une forte valeur ajoutée. « L’objectif est de faire rayonner notre savoir-faire de façon à apporter sur les meilleures tables ce qui se fait de mieux », souligne Christophe Février. 

Le groupe Fromi développe également des partenariats avec des producteurs de talents locaux. Cette démarche permet de distribuer leurs gammes dans leurs propres pays en leur mettant à disposition l’expertise technique et commerciale du groupe.

Fromi est aujourd’hui présente dans une trentaine de pays et continue à gagner et consolider ses parts de marché à l’export. 

Une logistique optimisée pour mieux valoriser l’artisanat

Derrière cette sélection pointue se cache une autre dimension, la performance logistique. « C’est un sujet qui devient de plus en plus critique, que ce soit pour réduire les délais, maîtriser les coûts de transport ou limiter l’impact carbone », souligne Christophe Février. Un poste de dépense nécessaire, perçu comme peu valorisable, dont l’entreprise Fromi s’efforce d’optimiser.

Ces efforts visent à minimiser les coûts logistiques en mettant à contribution les hommes et les structures pour absorber une partie de la contrainte d’éloignement, sans compromettre la fraîcheur ni la traçabilité des produits. Christophe Février complète : « On met tout en œuvre pour s’assurer qu’une mozzarella di buffalo puisse arriver, sur les tables des meilleurs restaurants de Tokyo, trois jours et demi après sa fabrication dans les Pouilles ». Les produits sont fragiles et avec les problématiques de DLC, cela renforce la complexité de l’export. Une équation rendue possible par une chaîne d’approvisionnement agile.

Pour relever ces défis, l’entreprise investit sur plusieurs fronts pour rationaliser ses flux et rester compétitive. Par exemple, le groupe a installé du solaire sur son bâtiment principal, atteignant ainsi 50% d’autonomie énergétique. Il a aussi renouvelé son parc de véhicules en choisissant de l’hybride rechargeable essentiellement fabriqué en France.

Fromi, toujours à l’écoute, travaille également à renforcer son socle numérique. Attentive aux besoins concrets de ses clients, elle travaille sur une interface intuitive destinée à faciliter la vie des fromagers, souvent débordés et seuls à gérer les commandes. 

Un engagement environnemental, aussi levier de sa compétitivité

Fromi intègre également des considérations environnementales dans sa stratégie. L’entreprise affirme une démarche volontaire. Elle a mis en place des actions concrètes telles que la réduction du gaspillage alimentaire en redistribuant à des associations. Elle interroge aussi régulièrement que nécessaire ses fournisseurs sur leurs propres engagements en matière de responsabilité sociétale. Christophe Février précise : « Quand on achète à une petite ferme, qui fabrique des produits de qualité, respectueux de la nature, elle est peut-être éloignée des normes RSE, mais elle pollue peu par nature ». L’entreprise agit sur ce qu’elle peut maîtriser et elle le transforme en acte.

Elle a entamé un cheminement structuré via un copil RSE. Elle est accompagnée par un cabinet franco-allemand pour répondre à la fois aux exigences françaises et allemandes. L’objectif est de publier un document stratégique d’ici fin 2026.

Cette évolution est aussi nourrie par les attentes des clients. « Ce sont des sujets qui prennent une importance croissante et nos clients nous challengent vraiment sur ces points », avance-t-il. L’entreprise Fromi se veut irréprochable sur ce qu’elle contrôle, même si elle reste un intermédiaire entre des producteurs et des distributeurs. Elle incarne un modèle lucide et transparent qui assume de ne pas tout faire, mais de bien faire ce qui est à sa portée. 

Dans ce contexte de challenges et d’évolutions rapides et exogènes, la CCI Paris-Île-de-France et la Team France Export restent des dispositifs de choix fiables et agiles qui s’appuient sur des équipes dynamiques et motrices.

Quant à l’avenir, Christophe Février reste résolument optimiste : « Le fromage, en sus des protéines, apporte une notion de plaisir accessible, indispensable à l’humain ». Fromi entend continuer de faire la différence, en se concentrant sur ce que l’entreprise sait faire : repérer, sélectionner, accompagner les producteurs sur le maintien de la qualité et l’innovation des produits, en s’appuyant sur un modèle fondé sur le lien humain, l’écoute du marché et l’intelligence collective.

Pour conclure, Christophe Février adresse un conseil précieux pour toute entreprise désireuse de s’implanter durablement à l’international. Au-delà des aspects techniques ou logistiques, il insiste sur un facteur souvent sous-estimé mais déterminant pour réussir à l’export : la compréhension fine des cultures locales, y compris à travers la structure même de la langue. « Il ne suffit pas de traduire un argumentaire commercial, il faut comprendre comment la langue façonne la pensée, les attentes et la manière de négocier », explique-t-il. Pour lui, cette acuité culturelle permet non seulement d’éviter les malentendus, mais surtout de créer une vraie proximité avec les clients et partenaires étrangers. C’est cette capacité à parler non seulement leur langue, mais aussi leur logique, qui fait toute la différence. 
 

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