Déclaration des bénéficiaires effectifs
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La directive européenne 2015/849/UE du 20 mai 2015 a imposé aux Etats Membres de mettre en place de nouvelles obligations afin de lutter et de faciliter les recherches des autorités gouvernementales contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la fraude fiscale.

Cette réglementation vise à rechercher, au-delà de la qualité apparente des associés d’une société, le ou les personnes qui la contrôlent effectivement.


Afin de parvenir à la réalisation de ces objectifs, le Registre des bénéficiaires effectifs a été créé par l’ordonnance du 1er décembre 2016.


Le décret 2017-1094 du 12 juin 2017, entré en vigueur au 1er août 2017, est venu préciser les modalités de dépôt et le contenu du document relatif à, l’identification des Bénéficiaires Effectifs.


Depuis le 1er avril 2018, toutes les sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés, à l’exception des sociétés cotées, doivent avoir déclaré au greffe du tribunal de commerce le ou leurs Bénéficiaires Effectifs.

 

Il s’agit d’identifier la ou les personnes physiques contrôlant de manière effective la Société.

I) La notion de bénéficiaire effectif

Conformément à l'article L 561-46 du Code monétaire et financier, la réglementation vise parmi les sociétés non cotées, les sociétés commerciales, civiles, les GIE et autres entités tenues de s'immatriculer au RCS.


L’article L.561-2-2 du Code monétaire et financier (CMF) dispose que « le bénéficiaire effectif s’entend de la personne physique qui contrôle, directement ou indirectement, le client ou de celle pour laquelle une transaction est exécutée ou une activité réalisée ».

 

L’article R 561-1 de ce même Code vise les personnes physiques :

  • “qui détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société ; 
  • ou exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction de la société ou sur l’assemblée générale des associés.

Le Bénéficiaire Effectif ne peut être qu’une personne physique.

 

Si les associés ou dirigeants sont des personnes morales, il faut alors rechercher et identifier le ou les personnes physiques qui contrôlent ces sociétés.

 

Nous allons passer en revue les critères pouvant être utilisés :

a) Le critère de détention du capital ou des droits de vote

Il s’agit d’un critère mathématique puisqu’il concerne des personnes physiques qui détiennent dans la société plus de 25 % des droits sociaux (parts sociales ou actions) ou des droits de vote.

 

Ce pourcentage peut être modifié lorsqu’il existe des actions qui donnent à leur propriétaire des droits de vote multiples.

 

Par exemple, une personne physique propriétaire de 15 % des actions à droits de vote double détient 30 % des droits de vote.


Cette détention des droits sociaux sera directe lorsque le Bénéficiaire Effectif est associé à titre personnel dans la société.

 

Elle sera indirecte lorsque les titres sociaux sont détenus par une autre société, elle-même contrôlé par une personne physique.

 

Cette personne sera alors considérée comme le Bénéficiaire Effectif de la première société et également aussi de la deuxième.


Pour les détentions indirectes, la difficulté consiste à identifier les personnes physiques qui sont associés d’une société détenant les actions de la personne morale dont on cherche à identifier le ou les Bénéficiaires Effectifs.

 

Un calcul doit être fait pour déterminer le pourcentage de détention indirecte d’un potentiel Bénéficiaire Effectif.


Attention, si un associé est Bénéficiaire Effectif au titre d’une détention directe et d’une détention indirecte, il convient alors de cumuler toutes ses participations afin de déterminer s’il possède plus de 25 % du capital ou des droits de vote.

b) Le critère de contrôle de la société

Cette notion, appliquée en droit des sociétés, permet d’identifier la personne qui contrôle réellement la société en dehors de toute considération de détention de titres sociaux ou de droit de vote.

 

Il ne s’agit pas non plus de déclarer le représentant légal de la société mais la personne qui exerce un pouvoir de contrôle effectif sur le dirigeant, l’administration ou l’assemblée générale.

 

Cela peut être possible grâce à une délégation de pouvoirs prévue par les statuts, un pacte d’associés ou encore par une convention d’indivision qui désigne une personne physique gérante de l’indivision.


Dans d’autres situations, l’identification du bénéficiaire effectif peut être également difficile.

 

Citons à titre d’exemples :

  • la détention d’actions ou de parts sociales par des mineurs ;
  • le démembrement des titres sociaux en usufruit et nue-propriété.

Dans toutes ces situations complexes, seule une analyse des actes juridiques permettra l’identification du ou des Bénéficiaires Effectifs concernée par l’opération.


La question s’est posée de savoir si les membres d’une même famille pouvaient être considérés comme Bénéficiaires Effectifs si collectivement ils détiennent plus de 25 % du capital ou des droits de vote ? 


Dans une fiche pratique destinée à aider les sociétés à identifier leurs Bénéficiaires Effectifs, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) a répondu que les membres d’une même famille devaient être Bénéficiaires Effectifs parce qu’ils s’agissaient de parents mariés et de leurs deux enfants.


Cette analyse a été critiquée pour les raisons suivantes :

  • l’appartenance à une même famille n’implique pas toujours un accord sur le contrôle d’une société ;
  • aucun membre de la famille ne détenait plus de 25 % des actions ou des droits de vote ;
  • ils n’étaient pas liés par un pacte d’associés qui aurait concrétisé leur accord sur le contrôle de la société.

Pour le Comité juridique de l’ANSA, pour que la notion de contrôle du groupe familial puisse être envisagée, il faut que le couple soit marié sous un régime de communauté et que les enfants soient mineurs (ANSA, comité juridique, 4 avril 2018, n°18-017).

c) Le Bénéficiaire Effectifs par défaut est le représentant légal de la société

La réglementation prévoit que si après examen de la situation de la société aucun Bénéficiaire Effectif ne peut être identifié, le ou les représentants légaux de la société seront alors déclarés Bénéficiaires Effectifs.


Il s’agit toujours, rappelons-le, d’une personne physique. Donc si le dirigeant est une personne morale (ce qui peut être le cas dans une SAS), la personne physique qui la dirige sera alors déclarée Bénéficiaire Effectif.

II) LES FORMALITES

a) Le dépôt de la première déclaration

L’article R.561-55 du Code Monétaire et Financier prévoit que chaque société concernée doit déposer un document intitulé déclaration au greffe du tribunal de commerce, pour être annexé au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS).


La déclaration est formalisée par un document reprenant les informations d’identification et les coordonnées de la société et celles des personnes physiques identifiées comme Bénéficiaires Effectifs.

 

Le greffe du tribunal de commerce fournit un modèle qui doit être rempli pour chaque Bénéficiaire Effectif.

 

Ce document doit être signé par le dirigeant de la société.


Ce document doit être déposé lors de la demande d’immatriculation au RCS (saisine directe du greffe) ou dans les 15 jours à compter de la délivrance du récépissé de dépôt de dossier de création d’entreprise (saisine du Centre de Formalités des Entreprises).


Depuis le 1eraoût 2017, les sociétés en cours de constitution doivent déclarer leurs Bénéficiaires Effectifs et déposer ce document lors de leur immatriculation.

 

Celles qui étaient déjà immatriculées à cette date avaient un délai supplémentaire pour se mettre en conformité.


Ce délai a expiré le 1er avril 2018.

 

Désormais, toutes les sociétés non cotées ont l’obligation de déposer leur première déclaration.

b) Le dépôt d’une déclaration modificative

La direction de la société est tenue de déposer un nouveau document dans le délai de (30) trente jours à compter de tout fait ou acte rendant nécessaire la rectification ou le complément des informations mentionnées dans le document initial.

 

A défaut de précisions dans le texte initial, il est recommandé que ce nouveau document comporte les mêmes informations et reste soumis au même formalisme que le document initial.


Toute modification au cours de la vie sociale affectant l’identité du ou des Bénéficiaires Effectifs doit également faire l’objet d’un dépôt au greffe.

 

Il en va ainsi en cas de cession d’actions ou de parts sociales, ou de nomination de nouveaux dirigeants.

 

Il peut également s’agir de la prise en compte de nouvelles situations affectant les caractéristiques de l’actionnariat de la société concernée comme, par exemple, l’émission de nouveaux droits de vote, de la détention des actions à droit de vote double, etc.


Il convient de noter que cette nouvelle formalité va impacter surtout les sociétés par actions.

 

En effet, contrairement aux cessions de parts sociales, les cessions d’actions ne font pas l’objet d’une publicité au greffe du tribunal commerce.

 

Désormais les dirigeants de SA, SCA et SAS devront se souvenir que la cession d’actions implique l’obligation d’effectuer le dépôt d’une déclaration modificative auprès du registre des Bénéficiaires Effectifs.

c) Formalisme de la déclaration

Pour faciliter l’obligation de déclaration, les greffes des tribunaux de commerce proposent aux entités concernées par la formalité des modèles de formulaires notamment via le site www.infogreffe.fr/rbe

 

Un litige est apparu entre le greffe du tribunal de commerce de Bobigny est une société lorsque cette dernière a voulu faire sa déclaration avec son propre formulaire et donc sans utiliser le formulaire proposé par le greffe.

 

Le greffier a alors refusé d’enregistrer la déclaration et renvoyé la société concernée vers une régularisation en remplissant le formulaire du greffe.


Le juge commis à la surveillance du registre du commerce a alors été appelé à statuer.

 

Le juge a rappelé que la réglementation n’impose pas à la société requérante de remplir le formulaire proposé par le greffe, elle peut donc utiliser son propre modèle de déclaration à la condition qu’il contienne les informations requises  par l’article R 561-56 du Code Monétaire et financier (tribunal de commerce de Bobigny, ord., 18 mai 2018, n°2018S07031).

c) Les Sanctions en cas de non-respect de non-respect de ces obligations

Le fait de ne pas déposer au registre du commerce et des sociétés le document relatif au bénéficiaire effectif ou de déposer un document comportant des informations inexactes ou incomplètes est puni de six mois d’emprisonnement et de 7.500 € d’amende, pour les personnes physiques, et 37.500 € pour les personnes morales (article L 561-49 du Code monétaire et financier).


Les personnes physiques risquent en outre une peine d’interdiction de gérer ou de privation des droits civils et civiques.

 

Les personnes morales risquent, notamment, la dissolution, le placement sous surveillance judiciaire et l’exclusion des marchés publics.

 

d) Les personnes pouvant accéder aux informations relatives aux Bénéficiaires Effectifs

 

Cette réglementation n’a pas pour objectif de porter atteinte au principe d’anonymat des sociétés par actions. Le registre regroupant les informations relatives aux Bénéficiaires Effectifs est un registre distinct du RCS, mais géré par le greffier du tribunal de commerce.

 

Il n’est consultable que par les personnes suivantes :

  • les dirigeants de la société concernée ;
  • l’administration des finances publiques ou les douanes ;
  • les magistrats ;
  • les organismes financiers qui luttent contre le blanchiment (TRACFIN) ;
  • toute personne justifiant d’un intérêt légitime sur requête au juge commis à la surveillance du RCS.
Mis à jour le 14/12/2018
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