Réforme de l'assurance chômage : de nouveaux axes pour prendre la direction du plein emploi ?

L’idée d’une assurance-chômage « plus stricte quand trop d’emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé » émanant des organisations patronales, malgré une forte opposition des organisations syndicales représentatives des salariés. Une réflexion légitime sur laquelle le gouvernement s’est positionné le 21 novembre dernier. 

En effet, il a été présenté aux partenaires sociaux les décisions relatives à la nouvelle réforme de l’assurance chômage ayant pour leitmotiv la variation de la durée d’indemnisation en fonction de la conjoncture et de la situation du marché du travail (tant que le taux de chômage ne dépasse pas les 9%). Notons cependant qu’une nouvelle modification des règles d’indemnisation a été écartée, étant rappelé que ces règles avaient été modifiées à compter du 1er octobre 2021 après une décision de suspension du décret relatif prononcée le 22 juin 2021.

Pour rappel ces changements interviennent dans le cadre de la grande réforme chômage dont les premières mesures ont été mises en place en novembre 2019. Reportée à plusieurs reprises en raison de l’épidémie mondiale, ladite réforme est entrée en vigueur en 2021. Ainsi le 1er février 2023, dans ce même projet, une seconde réforme sera appliquée, ainsi que ses nouvelles règles. 

Le ministre du travail, Olivier Dussopt, espère « 100 000 à 150 000 retours à l’emploi » supplémentaires en 2023 grâce à la réforme du chômage qui entrera en vigueur l’année prochaine et qui est l’application directe d’une promesse de campagne du Président Emmanuel Macron qui a pour objectif d’inciter les demandeurs d'emploi à retrouver plus rapidement un travail. L’exécutif entend également protéger les salarié(e)s contre le recours abusif aux contrats courts en instaurant un bonus-malus sur les cotisations chômage pour les entreprises. Par cette réforme le gouvernement souhaite, en plus d’un retour accéléré à l’emploi, lutter contre la précarité des contrats. 

Dans les faits, la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi ouvrant des droits à partir du 1er février 2023 sera réduite de 25 % avec un seuil de six mois. Concrètement, un salarié au chômage qui aurait eu droit par exemple à douze mois d’indemnisation dans le système actuel n’aura plus droit qu’à neuf mois si l’état du marché du travail est « vert », (avec un taux de chômage au-dessous de 9 %). Dans le cas où ce plafond est dépassé ou alors que le taux de chômage est en progression de 0,8 point sur un trimestre, alors leur durée d’indemnisation reviendra au niveau actuel. 

Force est de constater qu’il existe en France un réel problème de recrutement dans plusieurs secteurs en tension : les BTP, le transport, la logistique, l'hôtellerie ou le service à la personne notamment. Selon Pôle Emploi, en 2021, sur les 3,1 millions d’offres d’emploi déposées, 6 % n’ont pas été pourvues faute de candidat, soit 186 000 emplois. Notons cependant que derrière ces chiffres, se cachent également d’autres difficultés de recrutement liées aux conditions de travail proposées telle que la rémunération, les amplitudes horaires ou la pénibilité.

Ainsi cette nouvelle réforme vise donc à inciter les demandeurs d'emploi à retrouver plus rapidement un travail. De plus, l’Unedic (une association chargée par délégation de service public de la gestion de l'assurance chômage en France) compte sur ce nouveau mode de calcul qui entraînera une baisse moyenne de l’allocation journalière de 17 % la première année pour 1,15 million d’allocataires, représentant une économie comprise entre 3,5 milliards et 4 milliards par an. L’enjeu est donc double et transparaît des 3 objectifs majeurs de la réforme de l'assurance-chômage mise en œuvre en 2019 :

  •   La lutte contre le recours abusif aux contrats courts ;
  •   L’incitation au retour à l’emploi en permettant que le travail soit plus rémunérateur que l’inactivité ;
  •   La réalisation d’économies d’échelles afin d’atténuer le déficit de l’indemnisation liée à l’assurance chômage d’environ 2.9 milliards d’euros par an entre 2009 et 2019.

Notons que cette modulation ne sera pas appliquée dans les départements d’Outre-mer, le contexte économique étant "trop particulier pour que les critères nationaux retenus puissent être appliqués de manière efficace". Précisons également que certains emplois ne seront pas concernés par cette réforme, comme les marins, des pêcheurs, des dockers, des intermittents du spectacle, ou encore certains expatriés qui bénéficient d’un régime particulier et des demandeurs d'emploi en contrat de sécurisation professionnelle.

En conclusion, le gouvernement a choisi de ne pas moins indemniser mais d’indemniser moins longtemps afin d’inciter à un retour rapide à l’emploi et redonner du souffle à de nombreux secteurs en tension. De plus, cette réforme entre dans la logique économique d’un retour au plein emploi et d’une revalorisation du travail. Les premiers effets de cette réforme, dont les conditions d’accès à l’indemnisation restent inchangées (le fait d’avoir travaillé six mois sur une période de référence de vingt-quatre mois) sont attendus à partir du 1er août 2023. 
Sur le papier, les éléments annoncés complètent ceux de la réforme précédente entrés en vigueur l’année dernière pour atteindre les objectifs quantitatifs fixés. Mais nous sommes en droit de nous demander : qu’en sera-t-il de l’impact social et humain de cette réforme ?

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