Avec une formation dans le milieu associatif et un diplôme d’avocate spécialisée en droit des affaires, Nora Aït-Abdellah a commencé sa carrière en travaillant quelques années dans un cabinet d’avocat et dans des associations. « Je ne pensais pas un jour entreprendre, j’avais d’ailleurs beaucoup d’admiration pour ceux qui se lancent, car je connais les difficultés auxquelles ils se confrontent au quotidien. »
Profondément engagée, c’est la volonté d’avoir un impact positif sur la société qui pousse Nora à se lancer dans l’entrepreneuriat, en 2020. Son projet débute grâce à une rencontre. C’est dans son travail, au sein d’une entreprise très engagée face aux enjeux sociaux et environnementaux, qu’elle échange avec un agent d’entretien. Il lui raconte les difficultés qu’il rencontre dans ses tâches quotidiennes. Ce témoignage entraîne une prise de conscience pour Nora : une entreprise, même engagée, peut rencontrer des difficultés à trouver un prestataire de service responsable. « C’était en déconnexion avec les valeurs de l’entreprise dans laquelle je travaillais au quotidien, qui se voulait utile et engagée. J’ai informé la direction, qui était volontaire pour trouver des prestataires de services alignés avec ses valeurs. »
En menant ses recherches, elle se retrouve face à un manque de solutions et constate qu’il y a de réelles actions à mettre en place pour améliorer les conditions de travail des agents de de prestations de services. C’est alors que naît son envie d’entreprendre pour être proactive et répondre à cette problématique.
Après une enquête auprès d’entreprises pour essayer de comprendre les problématiques de ce secteur d’activité, Nora Aït-Abdellah crée Orseo.fr, une solution qui facilite les achats responsables de prestations de services généraux. Le principe ? Après une évaluation RSE, les prestataires de services sont référencés et mis en avant sur la plateforme. Orseo.fr facilite la mise en relation entre entreprises et prestataires de services sur la base de valeurs partagées.
Dès la création de son entreprise, Nora a ressenti le besoin d’être accompagnée : « Je savais pertinemment que je ne pouvais pas y arriver seule, j’en avais besoin pour structurer mon idée et avancer dans les premières étapes de mon projet. » Après un accompagnement, en phase d’idéation, Orseo rejoint le programme d’incubation « Entrepreneurs dans la ville », dédié aux entrepreneurs issus de quartiers prioritaires de la ville (QPV). Entreprendre en étant issu d’un QPV peut être plus challengeant : moins d’aides, manque de lisibilité de l’offre d’accompagnements, manque de réseau... Les dispositifs dédiés sont donc là pour permettre aux entrepreneurs de découvrir l’écosystème local et ses avantages. Un choix évident pour Nora : «J’essaye toujours de cibler des programmes qui correspondent à la fois à mon projet et à mon identité. Je n’ai pas honte de dire que je viens d’un QPV, ça fait partie de mon identité et mon histoire. »
En investissant cet écosystème entrepreneurial, elle découvre différents réseaux qui permettent une mutualisation des forces et des compétences. Se rassembler, échanger sur les difficultés rencontrées et s’inspirer les uns des autres est un vrai atout : « L’objectif est de montrer qu’il est possible d’entreprendre en QPV, d’inspirer les gens et de faire preuve de solidarité et de soutien. Aujourd’hui, la lumière est sur les entrepreneurs issus de métropoles, qui investissent dans la Tech. Pourtant, cela ne correspond pas à la réalité de l’économie française. Nous avons besoin d’entrepreneurs de la vie quotidienne, issus de tout le territoire. »
Avec une équipe de 6 personnes et un associé, Nora est aujourd’hui à la tête d’une entreprise en phase d’accélération. Au cours de ses trois années d’existence, Orseo a bénéficié de différents financements et a remporté plusieurs appels à projets et trophées. Des récompenses qui reflètent l’engouement sur cette entreprise.
Aujourd’hui, l’ambition première de Orseo.fr est de sensibiliser le plus grand nombre d’entreprises pour plus de durabilité et d’impact positif sur les sujets de la sous-traitance. À ses débuts, elle était surtout sollicitée par des entreprises situées en Île-de-France. Puis, l’offre s’est rapidement développée dans plusieurs grandes villes comme Bordeaux, Toulouse ou Nantes. Une croissance qui a boosté les envies de la jeune femme : à terme, elle souhaite pouvoir cibler des entreprises dans toute la France.
Avec le recul, elle définit l’entrepreneuriat comme un projet de vie. Si elle devait conseiller un entrepreneur en devenir issu d’un quartier prioritaire, elle recommanderait de bien définir les raisons qui poussent à se lancer, pour ne pas perdre l’envie en cours de route. « On ne sait pas forcément où se diriger pour obtenir de l’aide, mais il ne faut surtout pas rester seul. L’isolement peut très vite arriver quand on commence à entreprendre, mais c’est justement là qu’il faut chercher des programmes et des communautés pour retrouver la force d’avancer. » conclut-t-elle.